mardi 27 janvier 2015

L'après Charlie n'aura pas lieu à Romans



Lettre ouverte aux Elus et Citoyens

La question du lien social est redevenue centrale. Les faits récents qui ont touché notre pays ont rappelé tant son importance que sa complexité face à l'isolement et au repli sur soi, avec toutes les dérives que l'on connait. 


Najat Vallaud-Belkacem, Ministre de l'Éducation, l'annonce : « Je compte sur l'intervention de l'éducation populaire dans les territoires les plus fragiles pour porter et transmettre les valeurs de la République ». Et elle propose : « Les projets éducatifs territoriaux (PEDT) auront désormais un volet laïcité et citoyenneté » (22 Janvier 2015). Ce volet sera financé par un fonds d'État de 10 millions d'euros dédié, à destination des associations de jeunesse et d'éducation populaire. Par ailleurs l'Association des Maires de France (AMF) et son président François Baroin renchérissent : « L’AMF s’engage à prendre toute sa part dans la mise en œuvre auprès des enfants et des jeunes des actions nécessaires au respect des valeurs républicaines ». L’AMF a rappelé « le rôle qu’ont les communes et les intercommunalités dans la prise en charge des enfants et l’accompagnement des jeunes en complément des temps scolaires. » (15 Janvier 2015)


Il s'agit d'une cause nationale. Toutes les actions, toutes les initiatives contribuant à resserrer ce lien social, à faire que les générations, les confessions, les genres, se rencontrent, se parlent, apprennent à se connaître et à se comprendre sont saluées et encouragées. 


Les Maisons de quartier, les centres sociaux, les Maisons des Jeunes et de la Culture, et autres Maisons citoyennes, les petites associations sportives, culturelles... sont des endroits de proximité et de solidarité où tout un chacun peut se rencontrer, se connaître hors des clivages habituels. Ce sont ces endroits qui permettent encore de maintenir une cohésion sociale de plus en plus précaire. Et au niveau national comme au niveau local, nos dirigeants ne cessent de louer les actions menées, l'abnégation et l'engagement des salariés, la plus-value sociale portée par les bénévoles... 


La ville de Romans, bénéficie jusqu'à ce jour d'un tissu associatif et culturel riche permettant de conserver une relative paix sociale, malgré les difficultés (un tiers des Romanais vit en dessous du seuil de pauvreté, la ville compte deux quartiers prioritaires). Le couvercle tient sur la cocotte-minute tant bien que mal.


Si ces associations n'ont pas la prétention de résoudre tous les problèmes, la proximité et la personnalité de chacune permet d'accueillir bien souvent des citoyens esseulés (jeunes en rupture, anciens délaissés, familles monoparentales...), combattant ainsi l'isolement et/ou la communautarisation par des actions appropriées, concertées et réfléchies avec les habitants. Des actions auprès des enfants, des jeunes, des familles, des anciens... qui participent à l'éducation populaire, à la tolérance, à la citoyenneté.


La diminution annoncée des subventions municipales de 40 à 60 % selon les structures et, par ricochet, la diminution de celles de la Caisse d'Allocations Familiales met en péril l'éducation populaire romanaise sous sa forme actuelle et va à l'encontre de toutes les belles paroles énoncées précédemment.


Alors ? Alors, avoir abandonné nos quartiers à eux-mêmes n'aura, dans quelques années, fait qu'augmenter le sentiment d'insécurité et d'isolement. L'urgence est ici et maintenant. Les politiques sécuritaires seules, à long terme, n'ont jamais porté leurs fruits. Comme la cavalerie, elles arrivent souvent après la bataille. Le principe de précaution et de prévention doit s'appliquer prioritairement à la sauvegarde de tout ce qui peut contribuer à la cohésion sociale. 


La nouvelle municipalité s’est prononcée sur ces choix budgétaires. Il leur faudra assumer pleinement cette politique de diminution des subventions municipales à l'éducation populaire et aux associations alors que tout le pays se mobilise. Il leur faudra assumer la préférence donnée à la voirie sur le soutien et la consolidation des établissements et associations existantes. Il leur faudra assumer de n'envisager, comme seule solution, qu'un arsenal répressif (surveillance vidéo, recours ponctuel aux CRS...) sans trop se préoccuper de prévention et de proximité. Il leur faudra assumer de se placer à contre-courant de l'élan national actuel concernant la défense des valeurs de la République.


Des citoyens inquiets et le collectif « Résiste »